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4. octobre 2022

Focus sur l'itinéraire du patient

Réadaptation en cas d'accident

Réseau de traumatologie: il faut clarifier les règles du jeu

Comment créer le parcours idéal de réadaptation en traumatologie? CEO des deux cliniques de la Suva, Gianni Rossi explique la nécessité et le défi de renforcer le travail en réseau.
Competence Marie-Claire Chamot

auteur

Marie-Claire Chamot

Rédactrice de Competence pour la Suisse romande et le Tessin

marie-claire.chamot@hplus.ch

Pour la réadaptation, les acteurs de plusieurs professions et secteurs doivent intervenir auprès du patient. Où en est la Suisse dans la constitution de ces réseaux?

Pour que les patient·e·s puissent reprendre pied dans la vie en toute sécurité, il faut des réseaux solides en arrière-plan. Les institutions impliquées dans une réadaptation en Suisse cultivent aujourd’hui déjà dans le cadre des soins intégrés une bonne et intense collaboration, dont la coordination s’améliore constamment. Mais il manque aux cliniques de réadaptation des critères de qualité contraignants pour le traitement de patient·e·s gravement blessés et polytraumatisés. Il est capital d’intégrer plus étroitement la réadaptation complexe en cas d’accident selon des règles claires. Il faut des critères de qualité obligatoires qui confèrent sa légitimité au traitement de blessés graves et polytraumatisés. D’autres domaines de la chaîne de soins, comme les services de sauvetage, sont également concernés. Un pas en avant à cet égard augmenterait la force et la qualité de notre réseau de traumatologie.

Dr Gianni Roberto Rossi, CEO des deux cliniques de la Suva (la Clinique romande de réadaptation à Sion et la Rehaklinik Bellikon).

Des critères et des règles claires qui améliorent aussi les parcours des patient·e·s?

Lorsque les processus sont longs et comportent de nombreuses étapes, il est essentiel que les itinéraires cliniques soient définis. Tout particulièrement pour prévenir les risques de lacunes dans la prise en charge. Au sein d’un réseau de traumatologie, on définit pour chaque patient·e quelles institutions sont nécessaires pour prodiguer les meilleurs soins médicaux en réponse aux besoins individuels de chacun. Cela dépend du type de traitements et de services que couvrent les institutions au sein du réseau. Pour les institutions de réadaptation, les critères respectés par les fournisseurs de soins aigus doivent être clairs – et réciproquement.

Avec quelles conséquences sur les pratiques des diverses institutions partenaires?

Il est important que les règles du jeu soient limpides pour toutes les institutions, qu’une direction commune soit donnée et que les établissements travaillent selon la même systématique. Un certain degré de standardisation est nécessaire pour y parvenir. Cela ne signifie pas que les traitements seront moins personnalisés, mais cela permet aux institutions du réseau de savoir ce qu’elles peuvent attendre les unes des autres. Au demeurant, les processus normalisés augmentent la sécurité des patients et garantissent une qualité constante des traitements.

Il faut des critères de qualité obligatoires qui confèrent sa légitimité au traitement de blessés graves et polytraumatisés.

Dr Gianni Roberto Rossi

La protection des données fait-elle obstacle au travail en réseau?

En plus de la standardisation, qui est une mesure cruciale à mon sens, d’autres facteurs ont un rôle à jouer dans le renforcement des réseaux de traumatologie en Suisse. La protection des données par exemple, doit être conçue de manière à ne pas constituer un obstacle aux traitements. Pour nous améliorer en tant que réseau, nous avons besoin de données et de résultats empiriques des institutions. Si ces données ne sont pas disponibles, cela remet en question le perfectionnement du réseau.

La proximité géographique des institutions constitue-t-elle un facteur décisif?

Dans certaines phases du processus de traitement, il se peut que le patient ou la patiente requière des prestations qui ne sont pas proposées dans l’institution où il se trouve à ce moment-là. Dans de tels cas, la proximité géographique avec l’établissement en amont ou en aval peut être un avantage. Mais ce n’est pas un facteur décisif pour bien travailler en réseau.

Le fédéralisme est-il un obstacle difficilement surmontable?

Le fédéralisme peut avoir une influence, selon la situation. Il est possible qu’une institution appropriée ne puisse pas intégrer un réseau donné en raison d’intérêts cantonaux – ou à l’inverse qu’une institution cantonale soit créée, bien qu’elle soit inutile, sachant qu’il en existe une semblable hors du canton.

Qui peut et doit promouvoir le travail en réseau?

Je souhaite que le législateur et les institutions tirent à la même corde. Des progrès ne peuvent être accomplis que si l’ensemble des acteurs s’assoient autour d’une table: les partenaires des réseaux de traumatologie, les milieux politiques et toutes les parties prenantes qui sont appelées à garantir la sécurité de l’offre sanitaire en Suisse. Les patient·e·s doivent être impliqué·e·s activement, c’est essentiel, car tout ce que nous entreprenons vise en définitive à leur apporter les meilleurs soins.

Photo de titre: «Pour que les patients puissent reprendre pied dans la vie en toute sécurité, il faut des réseaux solides en arrière-plan», souligne le CEO des cliniques de la Suva. (Photo: Rehaklinik Bellikon)

   

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