L’arthrose, qui peut apparaitre dès 40 ans, se généralise avec l’âge touchant 65% de la population de plus de 65 ans et 80% de la population de plus de 80 ans. Cette affection dégénérative du cartilage entraine des frottements à l’origine d’inflammations, des douleurs, gonflements et raideurs, créant parfois de véritables handicaps. Elle touche majoritairement les articulations des genoux, des hanches, de la colonne vertébrale et des mains. Malgré l’étendue de la population touchée, relativement peu de recherches sont dédiées à cette maladie multifactorielle.
Jusqu’à présent, les personnes affectées se voient proposer des traitements anti-inflammatoires pour réduire la douleur ou des lubrifiants, tels que l’acide hyaluronique – naturellement présent dans le corps mais dont la production diminue avec l’âge – pour limiter les frottements. Dans les cas les plus problématiques, la pose de prothèses s’avère nécessaire.
Les groupes d’Éric Allémann, professeur ordinaire à la section des sciences pharmaceutiques de la Faculté des sciences de l’UNIGE, et d’Olivier Jordan, maître d’enseignement et de recherche, s’intéressent depuis une quinzaine d’années au développement de nouveaux traitements thérapeutiques. Ils contribuent à plusieurs axes de recherche, dont celui d’injecter dans les articulations des cellules souches qui vont libérer naturellement des biomolécules, telles que des facteurs de croissance, capables d’interagir avec les cellules du cartilage pour diminuer l’inflammation et stimuler la croissance de nouvelles cellules.
«C’est particulièrement vrai pour des injections de cellules souches dans des articulations, puisque ces tissus ne sont pas vascularisés et ne sont donc pas approvisionnés en nutriments et en oxygène», poursuit la chercheuse.
Pour contourner ce problème, les scientifiques ont tenté de fournir à ces cellules souches une source d’énergie afin d’augmenter leur durée de vie. «Le glucose était un bon candidat mais il se retrouve trop vite éliminé naturellement par les fluides du corps. La subtilité de notre travail a été d’accrocher les molécules de glucose à de l’acide hyaluronique, afin que le glucose ne soit pas tout de suite éliminé, mais soit libéré par petites doses régulières», explique Olivier Jordan.
Les auteur∙e∙s de l’étude ont donc testé la durée de vie des cellules souches avec ou sans glucose modifié, dans les conditions de laboratoire. Ils et elles ont constaté que les cellules souches, injectées à des cultures cellulaires de tissu du cartilage, survivaient plus de trois jours en présence du glucose associé à l’acide hyaluronique (contre moins de 24 heures en absence de ce glucose). Ces trois jours sont suffisants pour libérer les facteurs de croissance et molécules activatrices à l’origine de la régénération du cartilage.
Ces résultats sont très encourageants et prometteurs, mais ne sont encore qu’au stade de cultures cellulaires en laboratoire. Notre prochaine étape est de confirmer ces résultats dans un modèle animal.
Éric Allémann, professeur ordinaire à la section des sciences pharmaceutiques de la Faculté des sciences de l’UNIGE
Cette approche, qui consiste à ajouter un nutriment (le glucose dans le cas présent) à l’acide hyaluronique, ouvre de nouvelles perspectives pour les thérapies via les cellules souches dans des environnements mal vascularisés et pauvres en nutriments, tels que les articulations arthrosiques, mais aussi pour d’autres thérapies régénératives
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